Le docteur Nicolas Canivet est médecin généraliste. A la suite d’une formation médicale continue sur la Restauration de la Fertilité, il a choisit de se former à la NaProTechnologie. Il nous explique aujourd’hui comment la médecine de Restauration de la Fertilité fonctionne et quel est son potentiel dans la médecine reproductive de demain.
Médecine de la Reproduction…
Au cours des quatre dernières décennies, la médecine de la reproduction a connu des avancées considérables en terme de protocoles thérapeutiques et de technologies utilisés pour permettre une conception et une grossesse (et bien sûr l’arrivée d’un enfant en bonne santé si tout se passe bien) dans des situations d’infertilité vécues par des couples de plus en plus nombreux. Ces situations d’infertilité sont définies par une incapacité à obtenir une grossesse après 12 mois de rapports sexuels en période fertile. Elles se sont réellement multipliées durant les 30 dernières années pour de multiples raisons dont les plus connues sont : l’âge plus tardif de désir de grossesse, le surpoids et autres troubles de comportement alimentaire, l’éthylo-tabagisme, le stress aussi bien professionnel que socio-familial, les infections sexuellement transmissibles (comme Chlamydia de plus en plus fréquent), les toxines environnementales… Ces raisons touchent à la fois l’homme et la femme.
… ou le principe de substitution
L’approche dominante, dans l’immense majorité des services de médecine de reproduction, a été de développer des technologies et des protocoles de traitements hormonaux dans le but d’assister médicalement la procréation selon le principe de substitution. L’union sexuelle et la fertilité naturelle sont remplacées par une technique dissociée : insémination intra utérine de spermatozoïdes, fécondation in vitro +/- injection de spermatozoïdes dans l’ovocyte. Cette médecine peut faire l’objet d’un certain nombre de reproches : l’analyse diagnostique et étiologique (recherche de la cause) de l’hypofertilité est mise de côté et contournée par la technologie thérapeutique qui agit comme un rouleau compresseur, en se contentant d’un bilan standard d’infertilité souvent insuffisant ; le cycle menstruel et le cycle de fertilité physiologique ne sont pas spécialement étudiés mais sont au contraire carrément supprimés par les protocoles hormonaux ; la femme ou le couple sont réduits à leur simple (in)capacité procréatrice, sans considération pour leur fertilité naturelle altérée et leur fertilité au sens large du terme.
Médecine de Restauration de la Fertilité…
… ou le principe de coopération
Parallèlement à cette médecine « moderne » de reproduction, s’est développée de manière moins bruyante toute une médecine de restauration de la fertilité dont la vision fondamentale prend le contrepied de la médecine de substitution. La médecine de restauration agit selon le principe de coopération. Le soignant coopère avec le cycle féminin par l’étude d’un tableau d’observation du cycle, regroupant des indices par l’analyse des biomarqueurs et prescrivant des examens ciblés selon les phases du cycle, notamment dosages hormonaux et imagerie échographique. Ceci dans le but d’établir un diagnostic d’infertilité précis et de proposer des thérapeutiques diverses ayant pour finalité de redonner au cycle sa fertilité physiologique.
Les vertus de cette médecine sont nombreuses : la fertilité restaurée permet de replacer l’union sexuelle à la source de la conception et de la grossesse ; la femme ou le couple sont accueillis dans la globalité de leur personne, en considérant leur hypofertilité comme le point de départ d’un travail très large de reconstruction ; la femme ou le couple sont des partenaires actifs du soignant dans l’évaluation diagnostique et le traitement ; la méthode d’observation du cycle qui précède la médecine de restauration éduque ou rééduque le couple à une prise de décision mutuelle sur le choix ou non d’un rapport sexuel, à la maîtrise de soi, à la découverte de l’autre en dehors de la simple génitalité, au renforcement des liens affectifs entre eux ; la médecine de restauration répond à un grand nombre de situations pathologiques en dehors de l’infertilité, comme le syndrome prémenstruel, la dysménorrhée, le syndrome des ovaires polykystiques, fausses couches répétées …
Historiquement,
la médecine de restauration de fertilité s’est développée sous le terme NaProTechnology (Natural Procreative Technology) fondé aux Etats Unis par Dr Thomas Hilgers, chirurgien gynécologue : début des travaux en 1976 sur une standardisation de l’observation de la glaire cervicale inspirée de la méthode d’observation Billings, le Creighton Model FertilityCare System, puis description de la NaProTechnology (NPT) en 1991. Initialement formé par Dr Hilgers, le Dr Phil Boyle a développé par la suite son propre système Neo Fertility (2016) au sein de sa clinique de fertilité fondée à Dublin , Irlande, utilisant des protocoles plus proches de ce qui peut-être utilisé en Europe. Comme son nom l’indique, la NPT associe à la fois toute une éducation des femmes sur les paramètres de leur cycle menstruel, au travers d’une formation objective et standardisée à l’observation du cycle , aidant le soignant dans le diagnostic des pathologies sous jacentes, et une technologie médicochirurgicale développée pour l’évaluation et le traitement : dosages hormonaux ciblés, monitorage US de l’ovulation, techniques chirurgicales de pointe (laser, microchirurgie, techniques anti adhérences)
Pour conclure, la médecine de restauration de fertilité a encore un long chemin à parcourir pour trouver toute sa place au sein des services de médecine de reproduction et au sein de l’enseignement universitaire, mais son potentiel à la fois scientifique (études d’efficacité encourageantes, littérature fournie sur la physiopathologie, la démarche diagnostique et thérapeutique) et éthique (respect et épanouissement de la personne humaine sur tous les plans) en font à mon sens la médecine reproductive de demain.
Docteur Nicolas CANIVET
Médecin généraliste, formé à la NaProTechnologie.
Image d’illustration : Première de couverture du livre Manuel de restauration des Tableaux, Nicolaus Knut, éd. Könemann