Pourquoi le cycle menstruel est indispensable aux femmes 4/4 : son rôle dans le développement et la santé du cerveau

par | 3 Mai 2022 | Bienfaits du cycle ovulatoire, Puissance de la fertilité

Nous finissons notre série en partenariat avec Natural Womanhood par ce quatrième article « Pourquoi le cycle menstruel est indispensable aux femmes : son rôle dans le développement et la santé du cerveau ».

Au début de cette année, nous avons entamé une série intitulée « Pourquoi le cycle menstruel est indispensable pour les femmes », qui explique en quoi le cycle menstruel joue un rôle crucial pour la santé des femmes. Nous avons parlé de l’importance des hormones endogènes (c’est-à-dire, naturellement produites par le corps) et d’un cycle sain pour la maturation du système immunitaire, pour la santé des os, et pour la régulation du cœur et de la tension artérielle. Aujourd’hui, nous allons nous pencher sur le plus gros et le plus important de tous les organes : le cerveau.  

Notre tête consomme plus de 20 % de notre énergie, ce qui en fait notre organe le plus « couteux ». Et comme vous l’avez certainement deviné, nos hormones reproductives (en particulier l’œstrogène et la progestérone) exercent une très grande influence sur le cerveau. La santé du cerveau est un autre aspect dans lequel le cycle menstruel joue un rôle fondamental, tout comme l’ovulation et la bonne production des hormones qui régulent ce cycle. 

Votre cerveau et vos hormones ne peuvent se passer l’un des autres

La première chose qu’il faut remarquer est que les hormones stéroïdes (telles que l’œstrogène et la progestérone) sont synthétisées dans le système nerveux central et périphérique. Cela signifie que ces hormones sortent du système sanguin pour rentrer dans le cerveau, et exercent des effets structurel sur le cerveau. L’œstrogène cause une plus grande plasticité du cerveau et en améliore les fonctions cognitives, tandis que la progestérone régule les cellules gliales et contribue à la stabilisation de l’humeur[1]. Il faut également savoir que ces hormones sont loin d’agir de façon autonome. Si les effets de ces hormones ne se font pas ressentir de façon cyclique et équilibrée, les facteurs neuroprotecteurs qu’elles sont censées apporter disparaissent.  

Telle une reine, l’œstrogène domine au cours de la première partie de notre cycle (la phase folliculaire). À ce stade, le follicule dominant dans votre ovaire se prépare à l’ovulation et se met à grossir, tout en produisant de plus en plus d’œstrogènes. Ces œstrogènes intensifient l’activité des récepteurs de la sérotonine et la synthèse de dopamine. Ce qui augmente l’excitabilité des neurones. Ainsi stimulés, les neurones augmentent la plasticité structurelle des épines dendritiques dans l’hippocampe, dans les amygdales et dans le cortex préfrontal. L’excitabilité des neurones se traduit généralement par une sensation générale d’humeur enjouée, par une hausse du niveau énergétique et par une amélioration des compétences linguistiques et verbales. 

Au cours de la deuxième partie de notre cycle (la phase lutéale), la progestérone déboule et prend le premier rôle. La progestérone est l’antithèse de l’œstrogène. Au lieu de stimuler les cellules du cerveau, elle les soigne et les entretient en inhibant la production de glutamate provoquée par la dopamine. Lors de cette phase thérapeutique, les femmes font état d’une humeur plus douce, d’une baisse de l’angoisse et d’inclinations encore plus maternelles. Tout cela grâce au GABA, le neurotransmetteur le plus inhibiteur du cerveau. La progestérone (tout comme l’allopregnanolone, son dérivé) potentialise les synapses GABA-ergiques[2]. S’il n’y a pas de progestérone, il n’y a pas de GABA. Il est par ailleurs intéressant de savoir que des études préliminaires indiquent que le GABA pourrait être un traitement efficace pour le trouble dysphorique prémenstruel[3].   

Les cycles menstruels sont indispensables au développement du cerveau des adolescentes 

Vous êtes-vous déjà demandée pourquoi les adolescentes et les jeunes adultes ont si souvent tendance à prendre des décisions irréfléchies et paraissent avoir du mal à évaluer les risques encourus ? C’est en fait parce que leur cerveau (ou, plus exactement, leur cortex préfrontal) ne peut correctement évaluer les risques avant d’avoir atteint sa pleine maturité. Cette maturité n’est généralement atteinte que vers l’âge de 25 ans. Le développement et la protection du cerveau sont améliorés par un bon équilibre d’hormones endogènes, régulé par l’ovulation et les menstruations. Sans ovulation, le cerveau n’a pas la même possibilité d’arriver à maturité. Mieux encore, une saine concentration d’hormones endogènes pendant la maturation contribue à maintenir la plasticité du cerveau des femmes après la ménopause.  

Pertes de mémoire et dépression : les conséquences des contraceptifs sur le cerveau 

On pourrait croire que les hormones émises par les dispositifs contraceptifs ont le même effet sur la santé du cerveau que les hormones endogènes. Malheureusement, il apparait que les œstrogènes et la progestérone de synthèse communément employés dans les dispositifs contraceptifs causent une baisse de la concentration de sérotonine et une hausse de celle de la globuline liant les hormones sexuelles hépatiques (SHBG). La conséquence en est qu’il est plus difficile pour votre corps d’utiliser les hormones sexuelles qu’il produit naturellement.  

Cela pourrait être la raison pour laquelle les femmes qui recourent à la contraception hormonale présentent une réduction de l’hypothalamus, un organe qui « contribue à la régulation des fonctions corporelles essentielles, telles que la température corporelle, l’humeur, l’appétit, la libido, les cycles du sommeil et le rythme cardiaque[4] ». La réduction de l’hypothalamus est corrélée à une hausse de l’irritabilité et à des symptômes caractéristiques de la dépression. De plus, « les œstrogènes et les progestatifs de synthèse contenus dans les dispositifs contraceptifs peuvent réduire l’épaisseur du cortex des deux côtés dans le cortex orbitofrontal latéral et dans le cortex cingulaire postérieur », ce qui peut altérer de façon permanente certaines voies métaboliques des fonctions cognitives chez les femmes[5]. 

Il est bien établi que la pilule (tout comme ses dérivés tels que le patch, l’anneau vaginal, l’implant, l’injection et les systèmes intra-utérins) entraine un risque accru de dépression et des troubles de l’humeur. De plus, de nombreuses femmes font état de « pertes de clarté » en tant qu’effet secondaire de leur contraceptif. Certaines femmes ne réalisent pas qu’elles souffrent de perte de clarté avant d’arrêter leur contraceptif ; après être revenues à leur cycle naturel, de nombreuses femmes affirment se sentir comme si elles « voyaient en couleur pour la première fois ». Tout cela est corrélé à l’action exercée par le système endocrinien sur le cerveau. Lorsqu’on considère la situation dans son ensemble, en tenant compte non seulement du fait que les hormones de synthèse affectent l’organisation du cerveau, mais aussi qu’elles bloquent l’influence des hormones endogènes sur le cerveau, on comprend que tout cela engendre de véritables risques. 

Non, vous n’êtes pas folle : vos sentiments et vos pensées sont bel et bien déterminés en grande partie par vos hormones !  

La pilule et votre (absence de) réaction au stress 

Un autre contraste flagrant entre les cerveaux soumis à l’action de la pilule et ceux qui ne le sont pas est la réaction au stress – ou plutôt, leur absence de réaction au stress. 

Comme l’écrit le Dr Sarah Hill, l’auteure du livre This is your brain on birth control (« Voici comment la pilule transforme votre cerveau »), paru en 2019:   

« Depuis près de 30 ans, des recherches montrent que les femmes qui prennent une pilule contraceptive sont insensibles à la réaction au stress induite par le cortisol. Les femmes qui prennent la pilule ont une concentration plus élevée que la moyenne en cortisol total, une concentration élevée de transcortine (CBG), et présentent un dysfonctionnement des réactions au cortisol administré de façon exogène. Ceci est important, parce que ces caractéristiques ne sont généralement observées que lorsque l’organisme est submergé par le cortisol, ce qui fait qu’il n’a pas d’autre choix que de “couper » le signal, purement et simplement. »  

« Nous devrions tous nous inquiéter du fait que les profils de l’hormone de stress des femmes qui prennent la pilule ont plus en commun avec ceux des victimes de traumatisme qu’avec ceux de femmes en bonne santé[6] », prévient le Dr Hill. 

Les femmes qui connaissent un cycle naturel d’ovulation et de menstruation voient leur cerveau atteindre sa maturité, améliorer et entretenir ses fonctions cognitives, tandis que sa neuroplasticité est préservée pour l’avenir. Lorsqu’elles prennent des hormones de synthèse qui perturbent ces cycles reproductifs naturels, cela nuit au développement de leur cerveau. 

Le cycle menstruel est-il nécessaire ? La réponse dépend de l’importance que nous accordons à la santé globale des femmes, considérée comme un écosystème interconnecté, dans lequel la santé hormonale influence la santé du cœur, du système immunitaire et des os –et, nous le savons maintenant, du cerveau. Puisque l’ovulation et les menstruations exercent toutes deux des effets à long terme sur les fonctions cognitives (ce qui peut nuire à la manière dont vous interagissez avec vous-mêmes et avec autrui), il semble évident qu’il s’agit d’aspects fondamentaux de la santé féminine. 

Références :  

[1] Del Río J, Alliende M, Molina N, Serrano F, Molina S, Vigil P. Steroid Hormones and Their Action in Women’s Brains: The Importance of Hormonal Balance. Front Public Health. 2018 ; 6. doi:10.3389/fpubh.2018.00141 

[2] Boero G, Porcu P, Morrow A. Pleiotropic actions of allopregnanolone underlie therapeutic benefits in stress-related disease. Neurobiol Stress. 2020 ; 12:100203. doi:10.1016/j.ynstr.2019.100203 

[3] Hantsoo L, Epperson C. Allopregnanolone in premenstrual dysphoric disorder (PMDD): Evidence for dysregulated sensitivity to GABA-A receptor modulating neuroactive steroids across the menstrual cycle. Neurobiol Stress. 2020 ; 12:100213. doi:10.1016/j.ynstr.2020.100213 

[4] Study finds key brain region smaller in birth control pill users. ScienceDaily. https://www.sciencedaily.com/releases/2019/12/191204090819.htm. Publié en 2020. Consulté le 11 novembre 2020. 

[5] Petersen N, Touroutoglou A, Andreano J, Cahill L. Oral contraceptive pill use is associated with localized decreases in cortical thickness. Hum Brain Mapp. 2015 ; 36(7):2644-2654. doi:10.1002/hbm.22797 

[6] Hill S. This Is Your Brain On Birth Control. New York, NY: Avery ; 2019. 

Cassondra Moriarty, enseignante certifiée de la FEMM, Consultante en Lactation IBCLC

relu et corrigé par le docteur Lynn Keenan, MD

publié sur le site Natural Womanhood le 14/06/2020

traduit de l’anglais par l’association Natural Womanhood le 15/06/2021

Image d’illustration : Photo by Etty Fidele on Unsplash

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